26 juin 2017
| Par Jean-Marie Trespaille-Barrau, Responsable Veille Réglementaire | Invoke

Le projet AnaCredit est totalement inédit pour la zone euro de par le niveau de détail requis par la Banque Centrale Européenne. Jean-Marie Trespaillé-Barrau, Responsable de la cellule Veille Réglementaire Invoke, décrypte pour nous cette nouvelle réglementation à travers 10 questions-clés.

  • Reporting réglementaire bancaire
  • FAS Regulatory
  • Anacredit

1. AnaCredit : qu’est-ce que c’est ? 

AnaCredit est l’acronyme de Analytical Credit Datasets et désigne le projet opéré par la Banque Centrale Européenne (BCE) visant à créer une base de données statistiques harmonisée sur les crédits accordés par les établissements financiers de la zone euro et/ou qui font partie du Mécanisme de Supervision Unique (MSU).

 

2. AnaCredit : pour quoi faire ?  

En réponse à la crise financière de 2008, la Banque Centrale Européenne s’est engagée à exercer une surveillance macroprudentielle de l’environnement de crédit dans la zone Euro. Afin d’améliorer le cadre macroprudentiel existant, la BCE a décidé de déployer un reporting harmonisé sur l’ensemble de la zone euro, sur un niveau de granularité très détaillé. L’objectif est de permettre une plus grande couverture et comparabilité des informations collectées afin d’améliorer la réactivité de cette surveillance, et ainsi assurer une meilleure stabilité financière et une politique monétaire pérenne.

 

3. Qui est concerné par le projet AnaCredit ? 

AnaCredit concerne :

  • Les établissements de crédit résidents 
  • Les filiales d’établissements de crédit étrangers qui résident dans un État membre de la zone euro
  • Les succursales d’établissements de crédit qui résident dans un État membre de la zone euro

 

4. Quels sont les types de crédit concernés ? 

La Banque Centrale Européenne requiert, pour l’instant, des informations détaillées sur l’ensemble des crédits, exception faite des prêts accordés à des personnes physiques, dont la valeur cumulée par débiteur excède 25 000 €. Ce sont notamment des crédits accordés aux entreprises, des créances commerciales, des crédits multi-débiteurs, des crédits-bail, des opérations de prise en pension …  

À noter cependant que dans le projet DORIAN (DOnnées RIsques ANacredit), qui est le nom donné à la déclinaison du projet AnaCredit phase 1 en France, le périmètre des crédits concernés inclut l’ensemble des prêts accordés aux entreprises individuelles.

5. Comment s’organise la collecte de données AnaCredit ? 

Les entités soumises à AnaCredit doivent remettre un reporting qui s’articule autour de 10 tables (ou datasets) répartis en deux modèles (ou templates). Ces 10 tables permettent à la BCE d’obtenir sur chaque crédit observé plus de 90 indicateurs, couvrant à la fois des informations relatives aux instruments, aux contreparties et aux protections accordées. Notons que la BCE donne toute latitude aux Banques Centrales Nationales (BCN) de décliner ces modalités en fonction de leurs spécificités de collecte nationales.

 

6. Quand la première déclaration aura-t-elle lieu ? 

La BCE requiert une première remise AnaCredit sur base des données arrêtées au 30 septembre 2018. Nous noterons cependant que le règlement européen impose une remise anticipée de données de référence des contreparties au 31 mars 2018.  Cette remise anticipée ne concerne cependant pas les établissements de crédit français, puisque la Banque de France a annoncé qu’elle assurerait elle-même la déclaration du référentiel de contreparties à la BCE.

 

7. À quelle fréquence la BCE collecte-elle le reporting AnaCredit ? 

La plupart des tables (datasets) sont transmises mensuellement. A noter que si la BCE accorde aux succursales étrangères un délai de remise plus important qu’aux établissements de crédit résidents, ces délais de remises sont néanmoins déclinés par chaque régulateur national.  En France, dans sa « Notice Fonctionnelle Française à l’attention des déclarants », la Banque de France a indiqué que les délais de remise seraient harmonisés pour le 15 du mois suivant la date d’arrêté ou le premier jour ouvré suivant.

Fréquence du reporting Anacrédit

 

8. Comment s’organise le projet AnaCredit ?

AnaCredit est un projet qui s’inscrit dans une réflexion plus large de la BCE, qui consiste, à terme, de collecter des données granulaires sur l’ensemble des instruments sensibles des établissements de crédit. 

De fait, AnaCredit va amener les assujettis à adapter leurs systèmes d’information et leur gouvernance pour être en mesure de répondre aux futures phases, en cours de réflexion à la BCE

Si la phase 1, qui concernent les prêts et dépôts des entités juridiques, entre en application sur la base des données arrêtées au 30 septembre 2018, les phases 2 et 3 du projet sont quant à elles toujours en cours de réflexion côté BCE.

 

 

9. En quoi le reporting AnaCredit se distingue-t-il des précédentes réglementations ? 

Sa caractéristique majeure tient dans le niveau de détail des données qui vont être transmises aux superviseurs nationaux et européen. Ce niveau de granularité, encore jamais vu en Europe, va permettre aux analystes de la BCE de produire des reporting plus précis et donc plus proches de la réalité économique et monétaire de la zone euro.

 

10. Comment se préparer au reporting AnaCredit ? 

Il est certain que face à cette exigence de détail de la part de la BCE, la donnée est plus que jamais au centre de tous les enjeux. Les défis majeurs auxquels font face les établissements financiers résident à la fois dans la qualification, la disponibilité et la qualité des données. Le reporting AnaCredit nécessite la mise en place de contrôles avancés tout au long du processus de collecte et de déclaration. 

De plus, les établissements ayant des implantations dans plusieurs pays du MSU doivent être vigilants vis-à-vis des exigences nationales. La BCE a en effet laissé une marge de manœuvre importante à chaque régulateur national en ce qui concerne le périmètre, la définition et les modalités de collecte des données (format, délais, fréquence), ce qui donne lieu à des divergences parfois significatives entre les pays. Prenons par exemple le cas de l’Irlande, où la Banque Centrale d’Irlande (CBI) n’impose aucun seuil de remise, ou celui de la France où des informations additionnelles relatives aux personnes physiques seront collectées dès 2018.